Les histoires de pirates font toujours rêver

Les histoires de pirates me faisaient rêver. C’était l’aventure, la vie en mer, la liberté, les exploits et comme la sauvagerie des abordages me gênait j’y préférais le romantisme improbable d’une belle venant troubler le rugueux capitaine. Et aussi les fortunes de mer, bonnes ou mauvaises, celles qui faisaient perdre le bateau et celles des trésors retrouvés dans les îles lointaines. Îles qui ne pouvaient être que caraïbes et plus précisément Antillaises.

Mais qui n’est jamais arrivé aux Antilles, en avion ou par bateau, avec ces images de pirates venues de l’enfance et a cherché, juste pour le frisson, à reconnaître des lieux, des visages, des traces et en est reparti déçu, frustré ?

Car dans toute leur beauté les îles de l’arc Antillais nous déstabilisent par leur modernité et leur adaptation au tourisme de masse. Elles refoulent nos rêves d‘enfant, nous proposent d’être raisonnables, de passer à l’âge adulte, de profiter de nos vacances sable blanc et eaux turquoises.

Heureusement qu’il y a les San Blas ! Cet archipel sur les côtes Panaméenne rebat les cartes. Notre vision française réduit les Caraïbes aux Petites Antilles, Martinique et Guadeloupe pour les moins voyageurs, alors que la mer des Caraïbes est une vaste zone maritime, de la Guyane à Cuba, baignant les côtes orientales de l’Amérique centrale. Les San Blas ce sont des centaines d’îles, de criques, de baies, de lagunes. Le tout grand comme cinquante fois les Glénan. On y navigue facilement mais prudemment, guettant les hauts fonds coralliens, se fiant aux couleurs de l’eau, surveillant les courants.  Les yeux s’illuminent, l’imagination galope car le vrai décor des Caraïbes, celui des pirates, est bien là. Quelle chance que notre route vers le Pacifique nous y ait fait passer.

Les îles hollandaises nous avaient surpris, la Colombie séduit, le Panama ébahi. Les San Blas ajoutent une touche sauvage. Cet archipel corallien, loin des bruits du monde, habité par l’ethnie Guna nous accueille dans des mouillages somptueux. La barrière de corail brise les vagues, le plan d’eau est lisse, les atolls plats bordés de sable fin portent les inévitables cocotiers et quelques habitations. Et les Gunas sont d’une gentillesse et d’une simplicité remarquable.

Leur vie au quotidien se doit d’être en autonomie : pas de réseau d’eau, d’électricité ou de téléphone, pas de plantation, pas d’élevage, pas de faune à chasser. Le ravitaillement du continent fourni l’essentiel pour ceux qui savent limiter leurs besoins au strict minimum. Les voiliers de passage apportent quelques dollars échangés contre des poissons, des langoustes ou de l’artisanat textile local, jolis carrés décoratifs entre patchwork et broderie appelés « molas ». Nous sommes sollicités pour de l’eau, de l’huile ou de la farine, ceux d’entre nous qui possèdent un déssalinisateur rendent de grands services. Les déplacements entre les îles se font en pirogue, à la pagaie ou plus rarement à la voile. Les Gunas ont leur dialecte, parle également espagnol, parfois un peu l’anglais et ajoutent quelques mots de français pour nous faire plaisir.

Comment décrire nos journées dans ce paradis ? L’ennui devient un plaisir, la paresse une qualité.

Les pirates devaient se sentir bien dans ces lagons, protégés par la difficulté de repérer les passes, prêts à prendre en course les galions espagnols ou hollandais chargés de l’or spolié au amérindiens. Est-ce ici que les boucaniers ont apporté quelques cochons pour tenter une nouvelle vie de société autarcique ? Combien de trésors cachés sous les cocotiers ?

La beauté primaire de cet archipel rend possible toutes les divagations.

Cette escale en attente du passage du Canal de Panama nous incite à reconsidérer le parcours d’un tour de l’Atlantique classique. Plutôt qu’un but,  Les Antilles pourraient n’être qu’un point de passage vers cette mer des Caraïbes où nous aurions pu passer tellement plus de temps, y prévoir au moins une saison, essayer de s’arrêter aux îles Roques, prolonger la route vers le nord, caboter le long du Nicaragua ou du Belize, retrouver la Havane. Peut-être y reviendrons-nous, pour cette fois-là suivre la vraie route des galions et des pirates.

Un commentaire sur “Les histoires de pirates font toujours rêver

  1. coucou les navigateurs sympa de vous suivre en effet les San Blas font rêver c’est une escale qu’on avait envisager dans l’ancien temps où l’on devait passer Panama!

    bonne poursuite de votre voyage bisous Erwan et Dominique

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